Vendredi soir dernier, je rentre de la Friterie de Yann et Stéph, je me pose devant le PC, met en marche MSN. Julien (Mister Ergo!) me saute dessus dès ma connection et me dit "Y'a Gaëtan qui arrive pas à te joindre, je sais pas du tout pourquoi." Ni une ni deux, je chope le bigophone, et appelle Radio Boulogne sur Mer. Gaëtan me dit qu'un pilote cherche un copilote pour l'Avesnois, ce week-end, mais il ne peut y être lui.
"Bon, y'a un pilote qui cherche un pilote pour l’Avesnois, je peux pas y aller, mais je lui ai dit que je connaissais un p'tit jeunot"
"ah c'est cool ça, c'est qui ce pilote ?"
"Lebrun."
"Ah..."
Puis Jean-Jacques m'appela, à partir de ce moment, j'ai psychoté pendant 30 bonnes secondes, sortant quelques mots un à un de ma bouche avec au moins 15 secondes entre chacun... autant dire que j'ai pas parlé tant que ça... "T'es partant ?" Et c'était parti, j’allais donc être aux côtés de Jean-Jacques Lebrun ce week-end !
« Rendez-vous chez moi à midi. » On blablate un coup, le temps de préparer le camion, nettoyer la Celica et on est partis casser la croûte. Tiens, d’ailleurs, cette Celica, je suis resté devant pendant 10 minutes, la contemplant, comme un bijou, comme un monstre à dompter, comme un truc qui te dit « putain, ça va être chaud tout de même » … « c’est une K-AM quand même… » qu’on m’a dit…
On arrive avec le semi à Fourmies en début d’aprem, je vais chercher le road-book.
« Bonjour, vous venez pour quel équipage ? »
« Equipage Lebrun »
« Ah ! vous avez le numéro un »
« Ah… »
Petit coup de pression, genre « Mais… j’suis jamais allé pointer en premier moi ! » va falloir inaugurer ça… et ça se révèlera être… la même chose qu’un autre pointage !
Puis on partait pour les recos. Jean-Jacques a un style de recos que je ne connaissais pas. Il passe tout d’abord en repérage « à vue » sans prendre de notes puis un second passage en prise de notes. Chose qui s’est révélée efficace, ça lui permet d’avoir une meilleure approche dans sa note, de savoir anticiper dans les enfilades etc.
Les 3 autres passages s’étaient bien passés, la prise de notes plus rapide que celles que j’ai pu déjà faire. Gaëtan m’avait d’ailleurs dit après le Lyon-Charbo que je devais apprendre à prendre plus vite mes notes, en progrès…
Les recos terminées, on filait aux vérifs après avoir préparé l’auto : panneaux de porte, plaques, noms et Dino sur le pare-soleil ! . Lors des vérifs, rien de spécial, bien que les commissaires techniques ont trouvé un plombage de turbo mal fait, et ont décidé de le refaire. L’auto était mise au parc, en tête de convoi, petit « gloups »… la grosse auto, le nom sur l’auto, le panneau de porte flanqué du numéro 1, avec derrière les Valentin, Baudier, Mortier… « Euh… Maman ? »
Puis nous sommes repartis vers le parc d’assistance. Sur la route, je croise l’équipe de Françis Legrand, Pascal Dufour et Anthony Mortier où on m’accueille de la plus belle des façons… extra ta salade de pâtes Gwenn’ !
Puis vint dimanche matin. Réveillé par le soleil un peu avant l’heure prévue… Bizarrement, y’a qu’un truc qui me vient en tête dès mon lever… entre doute, ambition, je me rassure, limite je me concentre déjà, je me prépare. J’ai l’impression d’être au matin du RAC, qu’y’a un titre à aller chercher… alors qu’en fait… Café, tartines et c’est parti pour Fourmies. Là, c’est un moment que j’aime assez, bien que ça fasse du yoyo pour les trippes, lorsque les équipages viennent chercher leurs autos au parc, avec l’entrée dans le parc à 10 minutes du pointage. Tout le monde se dit bonjour, excellente ambiance, on se voit pour la première fois avec les équipages qui nous seront autour durant toute la journée. Anthony Mortier me balance un « ça va JC ?! » alors que son Pierre Schulz de copilote ose un « T’as bien dormi Jean-Charles ? » : comme un bébé. J’ai même mieux dormi de samedi à dimanche que de vendredi à samedi, j’étais sûrement plus rassuré… et plus KO. En fait, c’est sûrement mieux que cette course se décida au deriner moment : je n’ai pas eu le temps de flipper, de m’inquiéter. Vendredi soir, j’ai juste eu le temps de faire mon sac, préparer mes affaires, faire un article chez Dino et j’étais au lit…
Podium passé, enfin si on peut appeler ça un podium… donc je disais, tente de foire avec micro passée, on se dirige vers l’assistance, pour 20 minutes, tout se passe bien. On prend la route de l’ES, je fais mon job de copi, j’indique la route à Jean-Jacques, qui sort « Te fais pas de bille petit, j’connais la route » ça fera donc une chose en moins à gérer, le routier, mais je le suis quand même sur le road-book. Le timing de cette première liaison est vraiment short ! Faire Fourmies > Féron en 7 minutes, en respectant les limites, sans tomber sur une moissonneuse batteuse ou autre, c’est assez chaud. On arrive au CH quasiment dans la minute, je saute de l’auto avec casque et cagoule à la main, je les mets, la Celica entre en zone, je pointe et on y va ! Même pas le temps de stresser, parfait ! Sur la ligne de départ, personne devant nous, ça fait bizarre, j’avais toujours eu l’habitude d’avoir quelques autos devant nous. Là, la route se dessine devant nous, elle nous attend. Casqués, harnachés, je passe mon carnet de pointage par les 2cm ouverts de ma vitre, Véronique le prend, un sourire, un clin d’œil, ça rassure, c’est pas grand chose mais dans des moments pareils, on s’accroche à de petits trucs. Puis l’index se dresse devant le pare-brise, « une minute » puis la Tag Heuer prend le relais : 30 secondes. It’s the yoyotime in the trippes ! Je relis mes premières notes, comme d’hab : 200 mètres, bosse AF absolue … 100 mètres Gauche160+ … 200 mètres Gauche180+ …
5 4 3 2 1 … 0 ça part, ça pousse, j’suis collé au baquet, ça débite « 200 mètres, bosse AF absolue » ! Le premier virage se passe à fond, ça vole, l’auto bouge pas, les enfilades arrivent et se passent fort, très fort, je me sens dans le coup, à l’aise et concentré, « 100mètres bosse dans Gauche140 pr Droite120 corde AF » j’suis pas lâché… je retrouve mes sensations que j’avais eu avec Julien dans la Compact au RDN2006… j’suis dans le coup, pas largué, les virages défilent, les hectomètres paraissent des mètres, quelques virages en retard, Jean-Jacques me dit « la suivante ! » j’annonce, petit retard (fallait pas parler trop vite !). Vient l’arrivée, il fait chaud dans l’auto, c’est une fournaise là dedans ! Point Stop, je tends le carnet, on nous annonce le temps 2’41’’08, mais on ne peut pas avoir le temps de nos suiveurs, faudra attendre le regroupement, on aura pas le temps de leur demander leurs temps au départ de l’ES2. Entre ces 2 ES, on boit comme des trous ! Il fait chaud, vitres grandes ouvertes, faut faire de l’air avant l’ES. Pointage … 5 4 3 2 1 … 0 ça part, ça pousse, j’suis collé au baquet, ça débite « 300 mètres petit pont Gauche160 pr Droite110 pr Gauche180 très très long en 2 fois » ! Les kilomètres s’enchaînent, un gros gros freinage arrive (quitté droite pour entrée dans la fôret), j’ai appris la note suivante alors je me permet de regarder le passage de l’intérieur, en levant les yeux pendant quelques centièmes de secondes… passage de malades ! Le freinage, je vous en parle pas, c’est… putain ! Mon dos se décolle du baquet de 2 à 3 cm au freinage, j’étais pourtant bien sanglé, à ne plus savoir bouger… de la folie.
Puis on rentre sur Fourmies, fin de première boucle. On a 7.3 secondes d’avance sur Cédric Valentin et Sandra Havez, 7.6 sur Anthony Mortier et Pierre Schulz, j’ai le sourire ! Jean-Jacques avait décidé de mettre la purée dès la première ES, afin de faire le trou, et ensuite de gérer sa course. Alors vint l’attente… 1h40 de regroupement, heureusement qu’assistance et regroup’ sont proches ! Chose marrante, enfin ça dépend pour qui, quand nous sommes arrivés au regroup en fin de première boucle, les copains partaient pour cette première boucle, c’est là que j’ai pu discuter avec un autre copi, lui habitué à la Celica, qui était là aux côtés de Yannick Barrois, Boyote !
Et nous repartions pour la deuxième boucle ! Nous avions donc à gérer notre avance de 7.3 secondes. Dès la première ES de cette deuxième boucle, Cédric Valentin fit le meilleur temps, le seul chrono de la course qui échappa à Jean-Jacques. Baudier, Mortier et Valentin se tenaient dans cette 3ème ES du jour en… 4 dixièmes ! C’est chaud derrière nous, ça pousse ! Jean-Jacques disait en fin de rallye qu’il sentait les Chevrons de la Saxo sur son pare-choc, j’oserais ajouter qu’on sentait aussi une Teutonne et un Losange…
Quatrième ES, les 8 km de folie ! Au passage dans Rainsart, dans le célèbre passage d’épingles… EXCELLENT là dedans ! Tout en aveugle pour les 2 premières, à vue pour les 2 suivantes, dans l’épingle droite où pas mal de concurrents ont du renoncer, Jean-Jacques jette l’auto dedans, mais on en ressort un peu en travers, le nez de la Celica en direction du bas côté… l’auto part vers le bas côté, je vois la haie de près, on laboure ce bas côté, je gueule un « Lâche pas ! Lâche pas ! Lâche pas ! » et Jean-Jacques me réponds d’une voix posée et sûre « T’inquiète ! » on en ressort, et… « XXXX » … à l’arrivée, je retrouve Phil et Sève au CH, ça fait plaisir de voir des têtes connues, il paraît que j’avais le sourire!
Puis nous retournons au parc, pour le regroupement. Nous y pointons vers 14h01 pour un départ pour la dernière boucle à… 15h21 ! Youhooouuu ! Ca va être top ça ! Alors qu’il nous reste une vingtaine de minutes, Jean-Jacques (non pas, le pilote, le speaker !) annonce que la voiture numéro 1 partira à… 16h31 ! Pouuaaaah ! Y’aaaa l’teeeemps làààà ! En fait, la course a été suspendue à cause de la sortie de route de Jacky Crépin ( ) … au final, après une seconde annonce, on repartira à 15h41.
Après une dernière assistance, on part pour la cinquième ES, Féron-Rainsars, nous avons bien fait le trou et avons 11.7 secondes d’avance sur Cédric et Sandra et 16.1 sur BBMortier et Pierrot. Bonne avance, mais faut rester dans le coup. Entre le premier gauche et le second, qui passent quasiment à fond pour les 2, l’auto a sauté sur le côté, whoouuaah impressionnant à fond de 6 ! A l’arrivée de l’ES, JJ me lance « t’as senti l’auto comme elle a sauté ? si elle continuait, on y allait ! » ah bah ça rassure ! Pour ne pas avoir senti l’auto bouger ainsi, y’aurait vraiment fallu être sur une autre planète !
Puis vint le dernier routier vers une ES, l’ES 6 Zorées-Eutroeungt (je ne sais pas où ils ont trouvé ce nom… ), la dernière ES, les derniers kilomètres. Un tout droit, un tête à queue, un freinage un peu raté, et c’était terminé, ciao ciao la victoire. J’étais un peu stressé là, Jean-Jacques, je ne sais pas, il ne parle pas beaucoup durant la course. Le pointage et le célèbre « au revoir » aux personnes du pointage, alors qu’avant c’était « bonjour » puis « à tout à l’heure »… 5 4 3 2 1 … Jean-Jacques est à l’aise, surtout dans le bois, on y fait un passage de folie ! La Celica vole de virage en courbe aveugle, de cordes en glisse… que du bonheur ! Extra ! Le bois se termine par un « XXXX épingle gauche frein à main », énorme passage ! JJ met un coup de câble, l’auto glisse comme par magie et JJ remet la purée, j’suis collé au baquet, énoooooorme !! … pour « XXXX »… 8 km que j’ai savouré, jusqu’au flying-finish où, le temps d’arrêter l’auto Jean-Jacques me tend la main, « elle est bonne ! » « Merciiiii ! Merci Jean-Jacques ! » au Point Stop, j’suis fou, je tends mon carnet de pointage avec un sourire démesuré ! Un gosse que j’suis là, un vrai gosse, un gamin…! On reprend le routier, on fait 200mètres après le PS et l’auto s’immobilise sur le bas côté, « allez, viens, on va féliciter tout le monde ! » on allait, (comme à la TV dans les résumés WRC…) féliciter les autres équipages, la Clio Maxi arrive… moment de bonheur, j’suis un peu perdu là… la BMW M3 arrive, on se félicite, extra… puis la Saxo orange à son tour, Anthony en sort et m’arrive dessus « Félicitations JC », Pierre Schulz arrive à son tour, « Félicitations Jean-Charles » son accolade signifie beaucoup… Puis nous devions remonter sur Fourmies, arrivés là bas, les commissaires techniques nous sautent dessus « le passeport technique s’il vous plait » « putain je l’ai oublié au camion ! » le temps d’aller pointer en avance puis de courir au camion pour le choper et revenir… mais arrivé au camion, pas moyen d’ouvrir la porte, j’appelle Julien (vincentvega) pour qu’il dise au mécano qui est à l’arrivée de venir pour m’ouvrir… Anthony le mécano arrive, m’ouvre le camion et là… (second) coup de pression énorme, on trouve plus la sacoche ! On cherche on trouve, je le laisse fermer le camion, et cours à la Celica ! Je tends le passeport aux commissaires qui annotent la prise de décibels du matin… ouf ! Le coup de pression de folie que j’ai eu là… et un 400 mètres… Puis il est temps d’entrer en parc fermé, c’est bon, on y est, c’est dans la poche ! J’y retrouve mes parents, Julien, Gauthier et Julie… J’suis liquéfié… j’suis KO mais heureux d’y être ! Puis c’est le champagne ! Cédric Valentin m’arrose de la plus belle des façons, Jean-Jacques, lui nous offre une autre stratégie « On boit d’abord, on gaspille pas le champagne ! » sacré Jean-Jacques ! … Joie intense et savourée…
Cette victoire, je l’ai savouré… et la savoure encore, je pense même qu’elle se savoure encore plus au long terme… être sur le podium, avec à mes côtés des personnes qu’il y a pas encore 2 ans à mes débuts ou 2 semaines lors des Routes Picardes je voyais sur les listes d’engagés, c’est… :oops: tous ces équipages, toutes ces personnes, que je connais ou non, qui me félicitent, me congratulent, les potes qui appellent, les sourires, les « toi, t’as des couilles ! », les « Ah oué, quand même ! » « t’as assuré JC ! », les « hé JC ! tu sais que Gaetan [Houssin] n’a pas de victoire au scratch lui ? l’élève dépasse le maître ! » (ça, c’est juste pour l’embêter un coup tiens ), les clins d’œil, les « C’est bien petit », tous ces trucs… J’pourrai pas non plus oublier comment des gars comme Geoffrey Rumas, Ch’Baron ou Pierre Schulz m’ont félicité… Cette ambiance, c’est que du bonheur, une victoire, la première ne s’oublie pas…
J’oubliais un petit truc… l’auto est… c’est… pfffooouuu de la folie ! Ca pousse c’est impressionnant ! Ca freine… ça tient partout ! J’ai pris mon pied, mais d’une force… J’ai apprécié chaque virage, chaque freinage, chaque corde, chaque coup de câble (oh punaise le truc de dingue là ! ), comme si ça n’allait se faire qu’une seule fois. Chaque mètre, chaque note. Je me rends compte peu à peu de l’auto que c’est, de nos passages lorsque je revois vos caméras extérieures… « C’était moi là dedans ? »
Désolé pour tous ces abandons, entre autres Vincent et Damien, j’aurais tant voulu qu’on soit à l’arrivée ensemble…
Boyote, la prochaine fois que tu ne viens pas à la remise de prix alors que vous êtes cités, ça va chier ! Parce que qui a gueulé « ouuéééééé » en applaudissant lorsque l’équipage Barrois/Leclerc a été cité ? Devine ! J’ai pas eu l’air con tiens !
Merci à Jean-Jacques qui m’a fait confiance malgré ma petite expérience du baquet de droite, merci à son équipe.
Merci à Gaëtan Houssin qui m’a laissé ce baquet en or, et « offert » cette victoire. Merci à l’équipe Ergo!.
Merci aux potes.
Merci à vous, sur les ES, car si pour le public, les autos et équipages sont importantes, dans les autos, le public contribue énormément à ces moments de joie, ces visages vus au détour d’un virage, ces applaudissements, ces cris de joie, ces cornes de brume, tous ces trucs donc seul le public à le secret…
Merci aussi aux copis expérimentés qui m’ont conseillé, guidé, et Jean-Jacques qui m’a rassuré dès le début.
Merci à vous tous.
Photos par | Ergo! | Picardie Rally Photo | Auto Retro Halluin |
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Merci à eux